uBuntu est un concept de l’Afrique sub-saharienne qui exprime le fait pour tout homme de n’exister qu’à travers et par les autres hommes, d’appartenir à un réseau d’êtres humains interdépendants, qui rassemble au lieu de séparer comme le faisait l’apartheid. Après une longue période de ségrégation et de sujétion de la majorité des communautés du pays par une minorité, uBuntu permet d’aller au-delà de la vengeance, de la punition, de la victimisation de l’individu. Dépassant le concept occidental de justice punitive et expiatoire, il permet à l’ensemble du groupe social de progresser à partir d’une prise de conscience collective et d’un commun désir de regarder vers l’avenir.
Les métaphores de « nation arc-en-ciel », « miracle sud-africain, « révolution négociée », uBuntu », « Renaissance africaine », ont été utilisées par le gouvernement sud-africain et les leaders de l’ANC afin de transmettre des messages positifs à la nation. Le Président Nelson Mandela a rendu très populaire l’image de la « nation arc-en-ciel » ; cette image valorisait l’association de cultures, langues et origines multiples que l’on trouve en Afrique du Sud, dans un désir de dépasser les séparations stériles instaurées par l’apartheid.
L’expression « Révolution négociée » traduit le fait que l’Afrique du Sud est passée sans bain de sang d’un régime militaire raciste et répressif à une démocratie. L’un des premiers défis que devait relever l’ANC après sa victoire électorale était l’examen minutieux par la Commission pour la Vérité et la Réconciliation des crimes commis pendant l’apartheid. C’est au cours de cette période que le terme « uBuntu » fut utilisé par le président de la Commission, l’Archevêque Desmond Tutu.
Nous proposons un projet de recherche sur 4 ans autour du thème de uBuntu : l’on examinera le sens de ce concept dans les contextes culturel et politique sud-africain, mais aussi littéraire et linguistique, son utilisation dans les années 1960 et sa pertinence actuelle.
Le projet comporte 2 phases permettant d’analyser d’abord l’utilisation du concept d’uBuntu dans les années suivant immédiatement l’apartheid, puis dans les périodes de la « Renaissance africaine » et de la post-Renaissance.
uBuntu dans les années suivant la fin de l’apartheid ; Les thèmes suivants seront explorés :
uBuntu dans la Constitution de 1993, dans laquelle la « Clause d’amnistie » déclarait que l’uBuntu et non la justice punitive serait appliqué, ce qui fit entrer le concept d’uBuntu dans la campagne préparant les élections de 1994.
L’utilisation de ce concept par l’Archevêque Desmond Tutu et la Commission Vérité et Réconciliation.
La question des langues : les langues utilisées pendant les auditions devant la Commission Vérité et Réconciliation, l’impact de la possibilité offerte à chacun d’intervenir dans sa langue maternelle. Dans Country of my Skull, Antje Krog se réfère aux conséquences psychologiques de l’utilisation du « je » lorsque l’on traduit les expériences vécues par une victime de tortures.
Les figures emblématiques de cette période, par exemple Winnie Mandela, son évolution de « mère de la nation » à tortionnaire devant la Commission Vérité et Réconciliation, par exemple le retour de « Mama Africa », Myriam Makeba. »
2ème étape : uBuntu dans les périodes de la Renaissance africaine et post Renaissance africaine.
Ceux à qui l’on a refusé l’amnistie qu’ils demandaient devaient être poursuivis en justice après la fin des travaux de la Commission Vérité et Réconciliation. Certaines de ces affaires ne sont toujours pas réglées à ce jour. Critique de la période post Commission Vérité et Réconciliation.
Le discours prononcé en 1996 par Thabo Mbeki « I am an African » et son concept de « Renaissance africaine » qui projette l’Afrique vers le développement durable. Ceci suppose une communauté africaine dont l’Afrique du Sud serait le leader : seront examinés les racines et la mise en œuvre de la « Renaissance africaine », les moyens iconographiques utilisés pour l’accompagner, en littérature, dans les médias et au cinéma
UBuntu et son contraire la xénophobie. Le gouvernement peut-il ou non, veut-il se saisir du dossier des « étrangers illégaux » (Loi sur l’Immigration de 2002) ? Les frontières du pays et leur contrôle : pendant l’apartheid une grande partie de ces frontières étaient protégées par des lignes électriques. Aujourd’hui les migrants se lancent à la nage dans le fleuve Limpopo, ou bien traversaient à pied. Le concept de « frontière » en littérature sera étudié à la lumière de ce contexte. « Come back Africa » et la question de l’immigration : faut-il considérer l’immigration comme un problème ? On se penchera sur la controverse autour des statistiques. La vague de violence anti-immigrants de 2008, la situation des femmes, des enfants, des familles, des squatter-camps sera étudiée.
La criminalité : comment parler d’uBuntu dans une société où règne la violence dans des proportions inédites, surtout la violence entre personnes (coups portés à l’arme blanche, viol, intrusion dans les domiciles, braquages des voitures). Johannesburg, capitale mondiale du crime ?
Utilisation d’uBuntu dans la campagne pour les élections de 2009 ?
Atelier prévu pour 2010 : 12 invités extérieurs.
Colloque en 2011 : 20 invités extérieurs + 20 participants locaux.
Un atelier prévu pour 2012 : 12 invités extérieurs.
Colloque en 2013 : 20 invités extérieurs + 20 participants locaux.
Porteurs du projet : Sandra Saayman MCF, Claude Féral Professeur
Membres de l’équipe d’accueil EA 4078 participant au projet :
-Alain Geoffroy Professeur
-Gabrielle Fois-Kaschel Professeur
-Eileen Wanquet MCF HDR
-Jean-Philippe Watbled Professeur
-Laurence Gouaux MCF
Membres extérieurs :
-Miireille Rabenoro, Ecole Normale Supérieure, Université d’Antananarivo, Madagascar
-Dr. Paul Haupt, Résolution des conflits, Cape Town, South Africa
-Guy Tillim, photojournaliste, célèbre pour son exposition « Jo’burg » dans laquelle il montre comment des immigrants illégaux investissent les gratte-ciels abandonnés du centre de Johannesburg.
-Ecrivains : Njabulo Ndebele, Zoë Wicomb, Zakes Mda, Deon Meyer, Eben Venter, Antje Krog
-Universitaires sud-africains de nos universités d’échange (Universités de Cape Town, Western Cape, Stellenbosch et Johannesburg).
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